Le royaume khmer n’est plus seulement cette destination exotique aux temples d’Angkor que vos parents ont visitée. Aujourd’hui, le Cambodge est en passe de devenir un acteur majeur de la production de chaussures qui alimentent discrètement votre dressing. Derrière vos paires préférées se cache parfois ce petit pays d’Asie du Sud-Est devenu incontournable.
Les chiffres parlent d’eux-mêmes. En 2021, l’industrie cambodgienne de la chaussure a généré 1,3 milliard de dollars de revenus à l’exportation, soit une hausse de 20,4 % par rapport à 2020. Cette performance place le pays parmi les dix premiers exportateurs mondiaux de chaussures, avec 205 millions de paires produites en 2022.
Ly Khun Thai, président de l’association cambodgienne de la chaussure, explique cette croissance par plusieurs facteurs : la diminution des inquiétudes sanitaires, l’augmentation des taux de vaccination et la réouverture progressive des marchés internationaux. L’industrie emploie désormais plus de 130 000 travailleurs répartis dans plus de 100 usines.
Le royaume a su capter une partie de la production qui a quitté la Chine. Des pays voisins, comme le Vietnam ou le Myanmar, ont également vu certaines commandes être redirigées vers les usines cambodgiennes, pour des raisons de coûts ou de stabilité. Le Cambodge ne se limite pas à un seul type de produit : on y fabrique des chaussures en cuir, des modèles décontractés, des sandales et des chaussures de plein air. Cette diversification attire les grandes marques internationales, qui y trouvent un savoir-faire technique et des coûts de production attractifs.
La productivité a doublé en dix ans. Alors qu’un ouvrier ne produisait que 1 000 paires par mois auparavant, il en fabrique désormais 2 000. Cette montée en compétences s’accompagne d’investissements dans de nouvelles technologies et d’une transition vers l’industrie 4.0.
Les destinations principales des chaussures cambodgiennes révèlent l’ampleur du phénomène. Les États-Unis et l’Europe sont les principaux débouchés, suivis du Canada, du Royaume-Uni, du Japon et d’autres pays asiatiques. Cette répartition géographique témoigne de la capacité du royaume à répondre aux exigences qualitatives des marchés développés.
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Le pays a notamment profité des difficultés de ses voisins. Les conflits armés en Birmanie et l’augmentation du coût de la main-d’œuvre au Vietnam ont en effet entraîné un report de commandes vers le Cambodge. Cette redistribution régionale a permis l’ouverture de nouvelles usines, malgré quelques fermetures liées à la pandémie.
Cependant, l’industrie cambodgienne de la chaussure a dû faire face à des turbulences géopolitiques. En 2020, le pays a perdu une partie de son accès privilégié au marché européen, en raison de préoccupations liées aux droits de l’homme. Cette décision de l’Union européenne a réintroduit des droits de douane sur les vêtements, les chaussures et les articles de voyage en provenance du Cambodge.
Plus récemment, les tensions commerciales avec les États-Unis menacent le secteur. Le président américain Donald Trump a en effet évoqué l’imposition d’une surtaxe de 36 % sur les produits cambodgiens, si aucun accord commercial n’était conclu avant le 1er août. Cette épée de Damoclès pèse sur un secteur qui dépend largement des exportations vers le marché américain.
Face à ces pressions, l’industrie cambodgienne mise sur la modernisation. Les usines intègrent progressivement des technologies avancées et développent leurs propres programmes de formation. Cette transformation vise à améliorer la qualité des produits tout en maintenant la compétitivité des prix.
Le gouvernement cambodgien soutient cette évolution par le biais d’une stratégie de développement spécifique au secteur de l’habillement et de la chaussure. Cette feuille de route encourage l’acquisition de nouvelles compétences et l’attraction d’investissements étrangers.
Malgré les défis, les perspectives restent encourageantes. En 2022, les exportations de vêtements, de chaussures et d’articles de voyage du Cambodge ont atteint 12,63 milliards de dollars, soit une hausse de 14,9 %. Cette croissance témoigne de la résilience d’un secteur qui continue d’attirer les investisseurs.
Le président de l’association cambodgienne de la chaussure prévoit une hausse des recettes de 20 à 30 % grâce à la reprise des voyages et à l’augmentation de la demande mondiale. Cette prévision optimiste repose sur la capacité du pays à maintenir ses avantages concurrentiels.
L’approvisionnement en matières premières, notamment depuis la Chine, reste fluide et efficace. Cette stabilité logistique est un atout majeur pour une industrie dépendante des chaînes d’approvisionnement internationales.
Le Cambodge s’est imposé comme un acteur incontournable de la production mondiale de chaussures. Entre croissance soutenue et défis géopolitiques, le royaume khmer évolue dans un environnement complexe où l’innovation et l’adaptation seront déterminantes pour son avenir dans l’univers de la sneaker.
