La mode britannique se nourrit de contradictions : la tradition rigide se heurte à la rébellion, l’histoire se mêle à l’innovation. La collection automne 2025 de Denzilpatrick, présentée lors de la Fashion Week de Londres, capture cette dualité avec une gamme qui réinvente la masculinité à travers des motifs médiévaux et le courage des motards. Les créateurs Daniel Gayle et James Bosley, le duo créatif derrière la marque, se sont inspirés des uniformes de course de speedway, des armures féodales et de l’énergie brute des rues de Londres pour créer un récit de résilience et de réinvention.

La collection s’ouvre sur un clin d’œil au quotidien des navetteurs britanniques : des trenchs rembourrés, des cagoules et des tricots utilitaires. Toutefois, la vision de Denzilpatrick transcende l’aspect pratique. Des gilets argentés en forme de bouclier, des pantalons éclaboussés de boue et des vestes matelassées évoquent l’adrénaline des pilotes de speedway, un sport lié aux racines familiales de Bosley. « Nous voulions célébrer le fait de se pavaner en uniforme », explique Gayle, faisant référence aux tresses royales et aux imprimés de casques de chevalier qui ornent les hauts en soie. Ces pièces ressemblent moins à des costumes qu’à des armures pour la vie moderne, alliant fonctionnalité et style guerrier.
Les influences historiques sont profondes. Les clercs médiévaux et les seigneurs féodaux partagent le podium avec des coureurs de contrebande des années 1980, dont le look est unifié par une confection méticuleuse. Un costume marron en jacquard remarquable, tissé à Lyon, présente des armoiries rappelant l’héraldique ancienne. Les tissus traditionnels de la mode féminine, comme le satin duchesse rouge vif, réapparaissent dans des trenchs structurés qui défient les normes de genre. Les cardigans en laine mérinos noués avec des aiguillettes de style militaire soulignent la tension entre la douceur et la force de la collection.
Le parcours personnel de Gayle et Bosley en tant que créateurs queer met en lumière leur exploration de la masculinité. « Nous avons grandi avec la liberté d’exprimer notre sensibilité », a noté Gayle, opposant son expérience aux attentes rigides qui ont façonné la vie de ses frères. Cette introspection alimente des créations qui équilibrent vulnérabilité et puissance : des plumes d’autruche se déversent des revers comme des blessures de guerre, tandis que des cuirasses en argent reposent sur des tricots sur mesure. Même les accessoires – des sacs en forme de bouclier de différentes tailles – laissent entrevoir un certain défi, des outils pour une génération qui redéfinit ce que signifie être audacieux.
Le défilé lui-même, qui s’est tenu à l’école primaire Edith Neville, était empreint de théâtralité. Les mannequins, dont beaucoup sont des collaborateurs de longue date, ont défilé sur l’hymne punk de Billy Bragg, « A New England », leurs mouvements accentuant le dynamisme des vêtements. « Les gens ont besoin d’entendre et de sentir les vêtements », a souligné Gayle, mettant en avant des trenchs qui changent à chaque pas et des vestes bouffantes cintrées pour l’action. Si les vêtements pour femmes restent dans l’esprit, l’esprit inclusif de la collection résonne. « Nous construisons une fraternité… et une sororité », a-t-il ajouté.