Le géant du luxe Kering voit des signes de stabilité malgré une baisse de 12 % de son chiffre d’affaires au quatrième trimestre

Kering fait face à d'importantes baisses, principalement dues à Gucci, mais signale une stabilisation grâce à une discipline budgétaire et à des points positifs tels que Bottega Veneta. Des changements stratégiques dans la distribution et le leadership visent à relancer la croissance face aux défis de l'industrie, en équilibrant l'héritage et la réinvention.

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© Photo : Ymgerman (Depositphotos)

Le conglomérat français de luxe Kering a connu une année tumultueuse marquée par une baisse des ventes et des changements à la direction, mais le PDG François-Henri Pinault insiste sur le fait que le groupe se stabilise. Les derniers résultats financiers de Kering révèlent à la fois des vulnérabilités et une résilience dans son portefeuille de marques emblématiques telles que GUCCI, SAINT LAURENT et Bottega Veneta. Si les chiffres dressent un tableau sombre, les changements stratégiques et les points positifs émergents suggèrent que l’entreprise jette les bases de la reprise.

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En 2024, le chiffre d’affaires de Kering a chuté de 12 %, atteignant 17,2 milliards d’euros. Sa marque phare GUCCI, responsable de 63 % du bénéfice d’exploitation, a fait baisser les performances. Les ventes organiques de GUCCI ont chuté de 21 % sur l’année, avec une baisse de 24 % au quatrième trimestre, un trimestre critique. Les difficultés de la marque ont coïncidé avec le départ soudain du directeur de la création, Sabato De Sarno, qui a laissé un vide au niveau de la direction. Pinault reste toutefois optimiste. « Nous avons conduit Kering à un point de stabilisation », a-t-il déclaré, soulignant les efforts déployés pour affiner les stratégies produits et accroître l’attrait de la marque.

Les difficultés de GUCCI ont éclipsé les modestes gains réalisés ailleurs. Bottega Veneta s’est distinguée, avec des ventes annuelles en hausse de 6 % grâce à la forte demande pour ses articles en cuir. Au quatrième trimestre, les ventes de la marque ont bondi de 12 %, portées par l’Amérique du Nord et l’Europe occidentale. Malgré le départ du directeur de la création Matthieu Blazy, la prochaine collection Printemps/Été 2026 de sa successeure Louise Trotter laisse entrevoir un regain de dynamisme. SAINT LAURENT, quant à elle, a connu une baisse de 8 % au quatrième trimestre, mais a vu ses classiques réinterprétés, tels que ses sacs à main emblématiques, gagner en popularité.

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Les petites marques de Kering, regroupées sous la rubrique « Autres Maisons », ont enregistré des résultats mitigés. Les articles de maroquinerie de Balenciaga ont reçu un bon accueil de la part des consommateurs, tandis qu’Alexander McQueen a connu des difficultés pendant sa transition. Les maisons de joaillerie, telles que Boucheron, ont prospéré et Brioni a affiché une croissance à deux chiffres. La division lunetterie du conglomérat, qui a célébré son 10ᵉ anniversaire, a enregistré une hausse de 7 % de ses ventes comparables au quatrième trimestre, soutenue par la demande mondiale.

La discipline financière reste au cœur de la stratégie de Kering. Le résultat opérationnel courant a diminué de moitié pour atteindre 2,55 milliards d’euros, reflétant la forte baisse de GUCCI, mais les mesures de réduction des coûts ont permis d’atténuer le choc. Le flux de trésorerie disponible, hors opérations immobilières, a augmenté de 7 % pour atteindre 3,6 milliards d’euros, signe d’un contrôle opérationnel plus strict. Les investisseurs se verront proposer un dividende de 6 euros par action, un geste de confiance dans un contexte d’incertitude.

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Les observateurs du secteur notent que Kering est à la traîne par rapport à ses concurrents tels que LVMH et Richemont. La division mode de LVMH n’a connu qu’un déclin organique de 1 % de ses ventes au quatrième trimestre, tandis que Richemont a surpris les marchés en affichant une hausse de 10 % de ses ventes. Hermès, qui publiera bientôt ses résultats, devrait surperformer. Pour Kering, le renouveau de GUCCI n’est pas négociable. Le nouveau PDG Stefano Cantino, qui a pris les rênes en janvier, est sous pression pour articuler un plan de redressement clair. L’analyste de Morningstar, Jelena Sokolova, souligne que « la compréhension de leur stratégie de redressement, que ce soit par le marketing de marque, une vision créative renouvelée ou des investissements spécifiques, contribuerait grandement à rétablir la confiance des investisseurs ».

L’accent mis par Pinault sur « l’exclusivité de la distribution » souligne une tendance plus large de l’industrie vers des environnements de vente au détail contrôlés. Les ventes dans les magasins physiques de Kering, y compris le commerce électronique, ont enregistré une baisse de 13 % en 2024, mais les ventes en gros ont chuté encore plus, de 22 %. L’entreprise donne la priorité à des partenariats moins nombreux, mais de meilleure qualité, une décision qui s’est traduite par une chute de 53 % des ventes en gros de GUCCI au dernier trimestre. Ce recalibrage vise à protéger le prestige de la marque, mais il risque d’entraîner une baisse des revenus à court terme.

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Les difficultés géopolitiques et économiques ajoutent à la complexité de la situation. La baisse de fréquentation des magasins au Japon et l’inégalité de la demande régionale mettent en évidence la fragilité du secteur du luxe. Néanmoins, l’amélioration séquentielle de Kering sur la plupart des marchés au quatrième trimestre donne lieu à un optimisme prudent. L’Amérique du Nord et l’Asie-Pacifique ont montré des signes de reprise pour GUCCI et SAINT LAURENT, tandis que le Japon a pris du retard.

À l’avenir, les investissements de Kering dans la créativité et l’expérience client seront essentiels. L’accent mis par le groupe sur le savoir-faire et la durabilité correspond aux nouvelles valeurs des consommateurs, en particulier chez les jeunes acheteurs masculins plus exigeants. Le succès de Bottega Veneta, fondé sur le luxe discret et la qualité artisanale, offre un modèle. Alors que Louise Trotter se prépare à faire ses débuts, l’industrie sera attentive à sa capacité à trouver un équilibre entre l’innovation et l’héritage de la marque.

Pour l’instant, l’histoire de Kering est celle d’une transition. La capacité du conglomérat à stabiliser Gucci tout en soutenant les marques plus petites déterminera sa trajectoire. Pinault reconnaît le chemin à parcourir : « Nos efforts doivent rester soutenus. » À une époque où les consommateurs de produits de luxe exigent authenticité et agilité, les prochaines initiatives de Kering, de la direction créative de GUCCI à l’expansion de la lunetterie, mettront à l’épreuve sa capacité d’adaptation.

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