Avec une audace qui ne laisse personne indifférent, la collection Printemps 2026 de Maison MIHARA YASUHIRO interroge notre rapport à l’ordinaire. Maître du trompe-l’œil et du jeu des proportions, Mihara Yasuhiro s’est lancé un défi particulier cette saison : rendre hommage aux vêtements du quotidien.
« Notre thème concerne les gens ordinaires », explique le créateur japonais lors d’une présentation en coulisses. Cette approche marque un tournant dans l’univers du créateur, habitué aux volumes spectaculaires des dernières saisons. Cette simplicité apparente cache pourtant une complexité fascinante qui révèle toute la philosophie de la maison.

Vue de face, la collection semble effectivement « normale ». Les silhouettes évoquent les codes vestimentaires classiques : jerseys délavés, denims, satins et flanelles à carreaux dans des teintes passées. Mihara Yasuhiro puise dans ses premières créations des années 90 ainsi que dans l’esthétique preppy de marques comme Ralph Lauren et A.P.C., qu’il admirait au lycée.
Mais l’illusion ne dure qu’un instant. Les manches géantes qui pendent comme des écharpes devant les vestes, laissant les bras nus, annoncent la couleur. Un jean baggy apparemment classique se transforme en un pantalon cargo volumineux vu de dos. Cette dualité traverse toute la collection, créant des harmonies incongrues caractéristiques de la vision créative du designer japonais.

Le designer japonais développe une réflexion profonde sur la société contemporaine. « La grande tromperie de la société est qu’il y ait jamais eu quelque chose d’ordinaire. Nous sommes tous singuliers et monstrueux, certains sont simplement plus doués pour le masquer ». Cette philosophie transparaît dans chaque pièce, où les éléments de vestes en denim, de chemises à carreaux, de survêtements et de vestes universitaires se mêlent dans une harmonie déstabilisante.
Les messages brodés sur les vêtements renforcent cette critique. « I’ve never been to me » apparaît au dos de plusieurs créations, tandis qu’un t-shirt affiche « Don’t tag me ». Cette dernière inscription, que le designer portait lui-même lors de son salut final, fait écho à notre époque des réseaux sociaux : « Aujourd’hui, les gens se taguent sur les réseaux sociaux. Si vous déviez de la norme, vous êtes tagué. »
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Mihara Yasuhiro maîtrise l’art de découper et d’assembler des vêtements disparates. Une jupe mi-satin de lingerie, mi-tailleur de bureau illustre parfaitement cette technique. Les vestes en denim qui dissimulent des bombers MA-1 ou des vestes souvenir sukajan interrogent la perte de sens des uniformes militaires et des vêtements de travail qui envahissent nos garde-robes.

L’esthétique post-apocalyptique de la marque, avec ses pièces surdimensionnées délavées et grunge, est adoucie par l’humour. Des accessoires ludiques tels que des bananes et des glaces en plastique, ainsi que des sacs en forme de bananes et de dinosaures apportent une dimension enfantine. La collaboration avec l’artiste britannique d’origine indienne Navinder Nangla enrichit cette proposition avec ses graffitis « Fassion Weak » appliqués sur des chemises à carreaux et des jeans délavés.
La présentation elle-même prolonge le concept. Mihara Yasuhiro a invité Lennie Simo, star du web connue pour sa musique créée en tapant un stylo sur une table, à se produire en direct. Cette performance, filmée en gros plan et diffusée sur des écrans géants, illustre le fait que l’ordinaire peut devenir extraordinaire selon le point de vue adopté.