Le géant italien PRADA vient d’annoncer l’acquisition de Versace pour 1,25 milliard d’euros, un mouvement stratégique qui ramène la célèbre maison milanaise sous pavillon italien après six années sous contrôle américain.
L’annonce est tombée le 10 avril 2025. Dirigé par Patrizio Bertelli et Miuccia Prada, le groupe PRADA a officialisé l’accord définitif pour acquérir 100 % de Versace auprès du groupe américain Capri Holdings. Cette transaction marque un tournant décisif pour deux maisons emblématiques du luxe italien et souligne l’ambition de PRADA de créer un conglomérat capable de rivaliser avec les géants français du secteur.
« Nous sommes ravis d’accueillir Versace au sein du groupe PRADA et d’écrire un nouveau chapitre pour une marque avec laquelle nous partageons un engagement fort envers la créativité, le savoir-faire et l’héritage », a déclaré Patrizio Bertelli, président et directeur exécutif du groupe PRADA.
Cette acquisition intervient moins d’un mois après le départ de Donatella Versace de son poste de directrice artistique pour devenir ambassadrice de la marque, laissant place à Dario Vitale, ancien directeur de l’image et du design chez Miu Miu — une autre enseigne du groupe PRADA.
« Je suis absolument ravie que Versace rejoigne la famille PRADA. Gianni et moi avons toujours eu une immense admiration pour Miuccia, Patrizio et leur famille. Je suis honorée que la marque passe aux mains d’une entreprise familiale italienne aussi digne de confiance », a partagé Donatella Versace sur Instagram.
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Pour PRADA, l’intérêt de cette opération réside notamment dans la complémentarité des deux marques. Reconnue pour ses imprimés flamboyants d’inspiration baroque, Versace attirera probablement une nouvelle clientèle vers un groupe davantage associé à des designs minimalistes. « Il n’y a pas de chevauchements en matière de créativité ou de clientèle », a souligné Lorenzo Bertelli, directeur marketing et membre de la famille Prada.
Le montant de 1,25 milliard d’euros convenu représente une décote significative par rapport aux 2,15 milliards de dollars investis par Capri Holdings lors de l’acquisition de Versace en 2018. Cette baisse de valorisation reflète les difficultés financières rencontrées par la marque ces dernières années, avec une baisse des ventes de 6,9 % à 1,03 milliard de dollars pour l’exercice 2021.
Andrea Guerra, le PDG du groupe PRADA, a souligné que cette acquisition s’inscrit dans une vision à long terme : « Versace possède un énorme potentiel. Le chemin sera long et nécessitera une exécution disciplinée et de la patience. Le développement d’une marque prend toujours du temps et requiert une attention constante ».
En intégrant Versace à son portefeuille, PRADA consolide son statut de champion italien du luxe. Le groupe milanais, déjà propriétaire des marques PRADA, Miu Miu, Church’s, Car Shoe, Marchesi 1824 et Luna Rossa, affiche désormais une valorisation de 15 milliards de dollars. Cette concentration d’enseignes de prestige sous une même bannière italienne constitue une réponse aux conglomérats français qui dominent l’industrie, LVMH en tête.
Pauline Brown, ancienne présidente de LVMH Amérique du Nord, a commenté : « Les Bertelli cherchent depuis longtemps à créer un conglomérat de style LVMH en Italie. L’acquisition de Versace élève leur portefeuille à sept marques. À mon avis, c’est une approche intelligente, car elle renforce la diversité et la puissance du groupe Prada parmi les labels de luxe italiens ».
La transaction sera financée par 1,5 milliard d’euros de nouvelles dettes, composées d’un prêt à terme d’un milliard d’euros et d’une facilité de crédit-relais de 500 millions d’euros. Selon PRADA, le groupe « conserve une flexibilité significative du bilan compte tenu du solde de trésorerie et des facilités engagées non utilisées ».
L’opération devrait être finalisée au cours du second semestre 2025, sous réserve des conditions habituelles de clôture, notamment l’obtention des approbations réglementaires requises.
Cette vente s’inscrit dans la stratégie de recentrage sur les autres marques phares de Capri Holdings. « Cette transaction reflète notre engagement à augmenter la valeur pour les actionnaires, à renforcer notre bilan et à alimenter la croissance future de Michael Kors et Jimmy Choo », a expliqué John D. Idol, PDG de Capri Holdings.
L’accord a été conclu dans un contexte économique incertain, marqué par une baisse générale du marché boursier mondial et des inquiétudes concernant une possible récession, accentuées par les nouveaux tarifs douaniers imposés par le président américain Donald Trump. Ces turbulences ont même conduit à une légère réduction du prix initialement envisagé, qui était proche de 1,5 milliard d’euros.
Prada avait généralement évité les acquisitions majeures depuis ses achats de Helmut Lang et Jil Sander à la fin des années 1990, Patrizio Bertelli les ayant qualifiés d’« erreurs stratégiques ». Ce retour aux acquisitions témoigne d’un changement d’approche alors même que le groupe a réalisé des performances remarquables l’an dernier, avec un chiffre d’affaires en progression de 18 %, atteignant 5,4 milliards d’euros, défiant ainsi le ralentissement général du secteur du luxe.
La réunion de ces deux maisons iconiques sous une même direction promet de remodeler le luxe italien pour les années à venir, tout en préservant leur identité respective. Au sein du groupe PRADA, Versace « conservera son ADN créatif et son authenticité culturelle, tout en bénéficiant de la force de la plateforme consolidée du groupe, y compris ses capacités industrielles, l’exécution de la vente au détail et son expertise opérationnelle ».
