La collection Printemps 2026 de Yohji Yamamoto résonne comme un cri du cœur. Le créateur japonais de 81 ans a présenté ses dernières créations sous un voile de mélancolie et de révolte, transformant son podium parisien en tribune politique.
Yamamoto n’a jamais été un créateur discret, mais cette saison, il pousse l’engagement plus loin. Les pièces arborent des messages explicites imprimés recto-verso : « No more wars », « Kill me softly », ou encore « Long, hot summer ». Ces slogans transforment chaque vêtement en manifeste personnel.

Né pendant la Seconde Guerre mondiale sous les bombardements de Tokyo, le créateur puise cette urgence contemporaine directement dans son vécu. « Les êtres humains doivent se rassembler sans faire la guerre », déclare-t-il après le défilé, pointant du doigt l’inaction des politiques.
Les robes soyeuses côtoient des vestes aux manches coupées et des combinaisons de travail. Yamamoto privilégie les superpositions légères pour affronter la chaleur croissante des étés parisiens. Les pantalons fluides effleurent les chevilles, les shorts soyeux sont amples, et les costumes adoptent des proportions allongées et spacieuses.

Les imprimés vitraux ornent les créations noires, évoquant simultanément la spiritualité des cathédrales et les formes organiques sous-marines. Cette dualité graphique interroge : l’humanité construit-elle des merveilles ou détruit-elle son habitat naturel ?
Malgré les touches d’aqua et de bleu océan, le noir domine cette collection teintée d’esprit punk. Les modèles arborent des sandales montantes enserrant les pieds comme des cages, des pulls déchirés et des accumulations de chaînes autour du cou et des poignets.
Cette rébellion vestimentaire s’accompagne d’une réflexion sur l’environnement. Les messages évoquent les microplastiques, les ions hydrogène et la pollution océanique. Yamamoto transforme ses créations en supports pédagogiques pour sensibiliser à l’urgence climatique.
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Le défilé débute par une mélodie de harmonica plaintive et des sonorités blues, reflétant l’état d’esprit du créateur. Puis, Yamamoto lui-même interprète des duos et des reprises de standards : « Endless Love », « Will You Love Me Tomorrow » et « Don’t Look Back in Anger ».
Cette dimension musicale révèle une facette méconnue du designer qui rêvait de devenir musicien. « Nous avons besoin de chansons d’amour », explique-t-il, prônant la guérison par la mélodie plutôt que la rancœur.

Les pièces de la collection Pajama, détournées, les gilets rayés portés sous des ensembles en coton blanc, les transparences accessoirisées de bijoux éclectiques composent une garde-robe nomade et sophistiquée. Les costumes spacieux et les combinaisons finales, ornées de fragments de vitraux en forme de cœur, concluent cette proposition sartoriale.
Yohji Yamamoto prouve ainsi qu’élégance et engagement politique peuvent cohabiter. Ses créations interpellent sans sacrifier la beauté ni le confort. Chaque pièce devient un vecteur de sensibilisation, transformant celui qui la porte en ambassadeur involontaire d’une cause universelle.