L’élégance s’affirme comme l’un des thèmes majeurs traversant les collections masculines de la saison. Dans un monde qui a tourné la page du streetwear et des bouleversements récents, de nombreux créateurs s’interrogent sur ce que signifie, aujourd’hui, s’habiller avec aisance et raffinement.

Pour la griffe BED j.w. FORD, s’habiller avec aisance et raffinement n’est pas une simple tendance, mais un élément fondamental de l’identité stylistique de la marque depuis ses débuts en 2016. La nouvelle collection Printemps 2026 de BED j.w. FORD prolonge cette exploration de manière intime. Présentée à Paris, elle poursuit la quête personnelle de son créateur, Shinpei Yamagishi, pour ce qu’il nomme une « élégance alternative ». L’approche est celle d’un vêtement flottant et romantique, qui apporte une touche habillée à la garde-robe masculine.
Interrogé sur sa perception de l’élégance lors de sa présentation dans un cadre charmant du Marais, Shinpei Yamagishi répond avec un certain détachement. « C’est une question très difficile pour moi », admet-il. « Je la cherche depuis longtemps. J’ai un fort désir pour cette image de l’élégance, mais quand on me demande ce que cela signifie, je m’enfuis. »

Pour donner corps à cette notion insaisissable, il a puisé son inspiration dans la nostalgie bienveillante des œuvres de Norman Rockwell. Le créateur japonais, qui a appris le métier d’apprenti avant de lancer sa marque dans un petit appartement de Tokyo en 2010, voit dans les toiles du peintre américain une source de bonheur. « Quand je regarde ses peintures, même si je n’ai pas vécu cela, elles me rendent nostalgique et heureux », explique-t-il. C’est cette atmosphère qu’il a cherché à insuffler dans sa collection. L’objectif est de réinterpréter avec douceur les scènes ordinaires de la vie et de préserver des fragments de réalité à travers son propre prisme, à l’image de Rockwell qui capturait des moments de joie fugaces.
Cette saison, la marque inaugure une nouvelle catégorie de vêtements, qu’elle décrit comme des « uniformes de déjà-vu ». Le concept repose sur des pièces familières et universelles, imprégnées de l’esprit du temps et réimaginées à travers l’esthétique singulière de BED j.w. FORD. Des classiques intemporels du vestiaire, comme le denim, la chemise blanche et les tricots simples, sont ainsi transformés pour devenir des formes alternatives. Yamagishi précise qu’il ne s’agit pas d’uniformes institutionnels, mais plutôt de vêtements avec lesquels beaucoup de personnes peuvent développer un lien instinctif et personnel.
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La collection, que le créateur lui-même décrit comme sobre, se compose de pièces fortes telles que des vestes en denim floqué aux proportions surdimensionnées et des costumes à la texture chinée particulièrement douce. On remarque aussi une veste en coton noir tricoté dont la construction évoque le tweed emblématique de la maison Chanel, en référence subtile au savoir-faire de l’enseigne.
La sophistication de BED j.w. Ford se révèle souvent dans des détails qui demandent à être observés avec attention. Des éclats de glamour ponctuent la collection, à l’image des écharpes en brocart métallique, des chaussettes à paillettes ou d’une silhouette monochrome d’un rouge écarlate affirmé. L’introduction de l’imprimé à pois, qui s’invite sur des cravates en soie et des chemises tout en transparence, constitue une véritable nouveauté pour la griffe. En y regardant de plus près, on constate que chaque point est délibérément imparfait, avec des bords irréguliers comme s’il avait été tracé à la main, apportant ainsi une touche de fragilité. Cette démarche s’inscrit dans la continuité de la démarche « exprimer la complexité avec simplicité ». En épurant le vêtement de ses ornements, le designer poursuit une forme d’essence que le simple dessin ne saurait atteindre. Les silhouettes, bien que raffinées, présentent des contradictions discrètes.

Des drapés naturels et fluides coexistent avec des courbes plus étranges, des formes qui semblent avoir figé le temps un court instant tout en restant plausibles. Des détails techniques cachés, comme les manches resserrées par des brides élastiques ou les poches « privées » dissimulées à l’intérieur des blousons, transcendent leur logique fonctionnelle pour raconter autre chose. C’est dans ces éléments discrets que réside le bonheur tranquille du quotidien que le créateur cherche à exprimer.
La collection est baptisée « wink » (clin d’œil), un titre qui suggère qu’un souhait peut se loger dans un battement de cils. Ce que Shinpei Yamagishi peine à verbaliser, il le communique avec une clarté évidente à travers ses créations vestimentaires.