Kering et L’Oréal signent une alliance dans la beauté et le bien-être de luxe

Kering et L'Oréal scellent une alliance de 4 milliards d'euros incluant l'acquisition de Creed et des licences exclusives pour Gucci, Bottega Veneta et Balenciaga. Une coentreprise explorera le secteur du bien-être de luxe.

Par
Romain Huang
Romain Huang, c’est un peu le Sherlock Holmes du mascara et le Tintin du thermomètre. Après avoir décroché un master en journalisme (oui, rien que ça),...
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Le 19 octobre 2025, Kering et L’Oréal ont annoncé la conclusion d’un partenariat stratégique de long terme dans la beauté et le bien-être de luxe. Cette alliance, valorisée à 4 milliards d’euros, remodèle le paysage des cosmétiques haut de gamme en associant deux géants français aux expertises complémentaires. L’accord couvre l’acquisition de la maison Creed par L’Oréal, des licences exclusives de cinquante ans pour Gucci, Bottega Veneta et Balenciaga, ainsi que la création d’une coentreprise pour explorer les opportunités dans le domaine du bien-être et de la longévité.

Un repositionnement stratégique pour Kering

Luca de Meo, directeur général de Kering depuis septembre 2025, marque son territoire dès ses premiers mois à la tête du groupe de luxe. Cette alliance marque un tournant pour le conglomérat français, qui avait massivement investi dans la beauté depuis 2023. La création de Kering Beauté en février 2023, avec la nomination de Raffaella Cornaggia au poste de directrice générale, visait à développer en interne les activités parfum et cosmétiques des maisons du groupe.

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L’acquisition de Creed en juin 2023, pour un montant estimé entre 2 et 3,5 milliards d’euros, constituait la pierre angulaire de cette stratégie. Fondée à Londres en 1760, cette maison de haute parfumerie incarne l’excellence dans l’univers des fragrances de niche. Réputée pour son savoir-faire artisanal et sa maîtrise des ingrédients naturels rares, Creed est l’une des plus anciennes maisons de parfums de luxe encore en activité.

Une intégration optimale chez L’Oréal Luxe

L’Oréal récupère ainsi un portefeuille prestigieux qui renforce considérablement sa position sur le marché des parfums de niche. Nicolas Hieronimus, directeur général du groupe, a déclaré : « Je suis ravi de sceller cette alliance stratégique à long terme avec l’un des groupes de luxe les plus prestigieux, créatifs et visionnaires au monde. Ce partenariat renforcera encore notre position de numéro un mondial de la beauté de luxe et nous permettra d’explorer ensemble de nouvelles voies dans le domaine du bien-être. »

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Creed rejoint ainsi L’Oréal Luxe, division qui compte déjà des marques prestigieuses telles que Yves Saint Laurent, Armani, Valentino, Prada, Miu Miu, Jacquemus, Mugler, Azzaro, Maison Margiela, Viktor & Rolf, Ralph Lauren, Diesel et Cacharel. Le géant français de la beauté, qui emploie plus de 90 000 collaborateurs et a réalisé un chiffre d’affaires de 43,48 milliards d’euros en 2024, dispose des infrastructures nécessaires pour accélérer le développement mondial de Creed.

Les licences exclusives des maisons iconiques

Ce partenariat comprend les droits de conclure un accord de licence exclusif d’une durée de cinquante ans pour la création, le développement et la distribution des produits de parfumerie et de beauté de la marque. Cette licence entrera en vigueur après l’expiration de l’accord actuel avec Coty, dans le respect des obligations contractuelles de Kering. Les experts de l’industrie estiment que la franchise parfum Gucci génère environ 1,1 milliard de dollars de ventes nettes par an.

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Bottega Veneta et Balenciaga bénéficieront également de licences exclusives de cinquante ans dès la réalisation de l’opération, prévue pour le premier semestre 2026. L’Oréal versera des redevances à Kering pour l’utilisation de ces marques sous licence. Un comité stratégique sera mis en place pour assurer la coordination entre les marques de Kering et L’Oréal, et pour suivre les progrès du partenariat.

La parfumerie de niche en pleine expansion

Le marché mondial des fragrances devrait générer 62,11 milliards de dollars de ventes en 2025. Les parfums de niche constituent le segment le plus dynamique de cette industrie fragmentée. Nicolas Hieronimus a souligné : « L’ajout de ces marques extraordinaires complète parfaitement notre portefeuille existant et élargit considérablement notre présence dans de nouveaux segments dynamiques de la beauté de luxe. Grâce à Creed, nous nous imposerons comme l’un des principaux acteurs de ce marché en pleine croissance. »

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Les fragrances haut de gamme ont été le principal moteur de croissance du secteur de la beauté au cours des six dernières années. Cette catégorie connaît une expansion géographique vers l’Asie et se diversifie dans le secteur du bien-être, avec des produits dotés d’attributs fonctionnels. Les parfums unisexes gagnent également en popularité, répondant à une demande croissante de créations olfactives qui transcendent les catégorisations traditionnelles.

Une vision commune pour le bien-être

Au-delà de la beauté, Kering et L’Oréal s’associent pour explorer des opportunités stratégiques à la croisée du luxe, du bien-être et de la longévité. Ce partenariat exclusif prendra la forme d’une coentreprise à parts égales qui permettra de créer des expériences et des services combinant les capacités d’innovation de L’Oréal et la connaissance approfondie de la clientèle de luxe de Kering.

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Luca de Meo a déclaré : « Cette alliance stratégique marque une étape décisive pour Kering. En nous associant au leader mondial de la beauté, nous accélérerons considérablement le développement des fragrances et des cosmétiques pour nos plus grandes maisons, leur permettant ainsi d’atteindre une taille critique dans cette catégorie et de libérer leur immense potentiel à long terme, comme l’a fait Yves Saint Laurent Beauté sous la direction de L’Oréal. Ensemble, nous explorerons également de nouveaux horizons dans le domaine du bien-être, en combinant l’expertise inégalée de L’Oréal et notre rayonnement unique dans le secteur du luxe. »

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Un recentrage stratégique pour Kering

Cette alliance permet au groupe de se concentrer sur son cœur de métier : la mode et la maroquinerie. Le groupe, qui comptait 47 000 collaborateurs en 2024 et a réalisé un chiffre d’affaires de 17,2 milliards d’euros, avait accumulé une dette nette de 9,5 milliards d’euros au 30 juin 2025. Les 4 milliards d’euros issus de la transaction permettront de réinvestir dans ses marques phares, comme Gucci, qui connaît des difficultés.

Laurent Droin, associé et investisseur chez Felix Capital, a analysé la situation : « Créer une entreprise de beauté prend beaucoup de temps, et c’est très différent de la mode, même s’il existe des synergies du côté des marques. Pour L’Oréal, cela a beaucoup de sens, car c’est une opportunité unique d’acquérir un véritable portefeuille de beauté de luxe. Cela a du sens pour les deux parties. »

Des implications pour tout le secteur

Cette alliance bouleverse l’équilibre du marché de la beauté de luxe. Les principaux acteurs du secteur, comme Coty, Estée Lauder, Puig et Interparfums, devront adapter leurs stratégies face à ce nouveau géant. Coty, qui détient actuellement la licence Gucci jusqu’en 2028, voit son avenir dans le secteur du luxe remis en question.

Les marques de parfumerie de niche détenues par des fonds de capital-investissement observent cette transaction avec attention. Des maisons comme Parfums de Marly, Initio Parfums Privés ou Kayali pourraient voir leurs perspectives d’acquisition modifiées par ce repositionnement majeur de L’Oréal. Un expert de l’industrie a commenté : « L’Oréal a fait un choix clair entre l’acquisition d’une marque indie soutenue par du capital-investissement et une grande acquisition comme celle-ci. »

Le succès d’Yves Saint Laurent comme modèle

Ce partenariat s’appuie sur le succès d’Yves Saint Laurent Beauté, une marque de Kering développée par L’Oréal depuis des décennies. Cette collaboration historique démontre la capacité des deux groupes à travailler ensemble pour créer de la valeur. Luca de Meo a d’ailleurs mentionné ce précédent dans ses déclarations, soulignant comment Yves Saint Laurent Beauté a atteint une taille critique sous la direction de L’Oréal.

L’accord est assorti des conditions habituelles, notamment des autorisations réglementaires et du respect des obligations de Kering en matière de droit du travail français. La transaction devrait être finalisée au premier semestre 2026, marquant ainsi une nouvelle ère pour les deux groupes.

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