La collection Jean Paul Gaultier printemps 2026 repousse toutes les limites. Le créateur néerlandais a officiellement pris la tête de la maison parisienne et présente ici sa première vision du prêt-à-porter masculin, dans les sous-sols du musée du quai Branly. Ce dimanche d’octobre marque un tournant pour la griffe française, qui retrouve enfin un directeur artistique permanent après cinq années de créateurs invités.
Duran Lantink refuse de se plonger dans les archives. Il préfère puiser dans ses souvenirs personnels de la marque pour créer une fantaisie. Le résultat frappe par sa radicalité. Les silhouettes pneumatiques semblent en effet surgir d’un rêve de science-fiction dans lequel les corps masculins se réinventent.

Le défilé commence avec une pièce évoquant le célèbre corset conique de Gaultier, transformé en volume gonflé. Les combinaisons futuristes, coupées haut sur la jambe, suivent. Les vestes voient leurs ourlets se recourber, en clin d’œil aux chapeaux de marin. Un trench coupé en deux laisse apparaître le torse.
L’inspiration puise dans le club RoXY d’Amsterdam. Adolescent, Lantink découvre le livre du photographe Cleo Campert qui a immortalisé ce lieu mythique de 1988 à 1999. Les images de fêtards portant la ligne Junior de Gaultier le marquent profondément. Cette liberté nocturne imprègne toute la collection, justement baptisée Junior.
Les tops et leggings en trompe-l’œil représentent des corps velus ou des organes en version cartoon. Certains affichent même des tatouages imprimés en trois dimensions. D’autres arborent le logo Junior Gaultier, qui donne son nom à cette première collection. La rayure marinière emblématique devient une illusion optique perturbante.
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Lantink utilise du fil de fer pour créer ses formes tridimensionnelles emblématiques. Une robe rayée courte présente une courbe en S à l’avant comme à l’arrière. Le créateur a également inventé un pantalon révolutionnaire composé de deux bandes de tissu tendues d’une ceinture jusqu’aux chevilles. Le corps reste plus découvert que couvert.
Les bodysuits poilus sont le moment le plus audacieux du défilé. L’un d’entre eux présente une nudité masculine frontale complète. Après le défilé, une éditrice se demande ce qu’elle vient de voir. Cette provocation assumée rappelle l’esprit originel de Jean Paul Gaultier, qui avait fait scandale dans les années 1980 en habillant les hommes en jupe.
Le Néerlandais raconte qu’il a reçu son premier vêtement Gaultier à l’âge de douze ans. Ce bonnet orné de cornes de diable ne le quitta plus. Quelques années plus tard, il porte une chemise JPG en mesh ornée de Ganesh le premier jour dans son lycée conservateur. Les tétons apparents choquent. Ces vêtements lui ont permis de construire son identité.
Les accessoires retiennent l’attention. Ses lunettes de soleil ont des verres qui semblent flotter loin du visage. Les pantalons sont dotés de ceintures aux lignes courbes. Les robes longues structurent le bas de la collection.

La palette chromatique puise dans l’ADN de Gaultier. Le bordeaux y côtoie la moutarde et le bleu ciel. Un body orange vif moulant évoque les tenues sportives futuristes. Un ensemble noir gonflé d’air transforme la veste masculine en une sorte d’armure molle. Un manteau blanc surdimensionné reprend les volumes en forme de cocon des années 1990.
Lantink travaille de manière intuitive. Il cherche à capturer une énergie particulière. Cette approche instinctive lui permet de réinterpréter les codes sans les copier. Son processus, baptisé Duranification, détourne et réinvente les concepts d’archives. Le tatouage sur tulle iconique se transforme en volumes spectaculaires.
La collection s’adresse clairement à la jeunesse. Les vêtements de club et de rue dominent. Lantink traite les icônes de Gaultier avec une irrévérence que le fondateur de la maison aurait reconnue et appréciée. Jean Paul Gaultier a montré son émotion lors du défilé. Le jeune créateur vise juste.
Certaines pièces ont un potentiel commercial certain. Les tops et leggings imprimés pourraient séduire au-delà des podiums. Les vestes aux ourlets travaillés offrent une alternative portable. Les pantalons aux ceintures courbes proposent une nouvelle silhouette.
Le défilé perturbe les spectateurs. Cette réaction fait partie de l’intention. Selon Lantink, la mode doit déranger. Le corps devient un terrain d’expérimentation visuelle. Les créateurs recherchent généralement la grâce, mais le Néerlandais préfère la tension. Ce défilé affirme une confrontation entre le corps et le vêtement.