Les banques centrales pourraient bientôt détenir du bitcoin et de l’or à des fins de réserve stratégique

Selon Deutsche Bank, les banques centrales détiendront du bitcoin et de l'or comme réserves stratégiques d'ici 2030, profitant de la faiblesse du dollar et de l'adoption croissante des actifs numériques par les institutions.

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Christian Morizot
Christian Morizot
Pigiste ardu
Christian Morizot, c’est un peu le couteau suisse du numérique : pigiste depuis presque dix ans, il a roulé sa bosse dans la tech et le...
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© Photo : EdZbarzhyvetsky (Depositphotos)

D’ici 2030, le bitcoin pourrait ainsi rejoindre l’or dans les réserves stratégiques des banques centrales mondiales. Cette perspective, évoquée par la banque, s’appuie sur un constat simple : le dollar américain perd du terrain.

Marion Laboure et Camilla Siazon, économistes chez Deutsche Bank, viennent de publier un rapport intitulé « Gold’s Reign, Bitcoin’s Rise ». Elles y dessinent un nouveau paysage financier dans lequel le bitcoin devient une « pierre angulaire moderne de la sécurité financière », à l’image de l’or au XXe siècle. Cette analyse intervient alors que les deux actifs atteignent des sommets historiques.

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L’or s’approche des 4 000 dollars l’once. Le bitcoin a dépassé les 125 000 dollars en 2025. Ces performances ne sont pas le fruit du hasard. Les tensions commerciales américaines et les risques géopolitiques incitent les investisseurs à se protéger contre l’inflation.

Les banques centrales pourraient bientôt détenir du bitcoin et de l'or à des fins de réserve stratégique
Courbe rouge : or / courbe bleue : bitcoin

La chute du dollar accélère le mouvement

Le dollar américain ne domine plus comme avant. Sa part dans les réserves mondiales est ainsi passée de 60 % en 2000 à seulement 41 % en 2025. Cette érosion provoque des afflux records vers les ETF adossés à l’or et au bitcoin.

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Les banques centrales ont commencé à accumuler de l’or après la crise financière de 2008. Elles sont devenues acheteuses nettes en 2010. Aujourd’hui, elles détiennent environ 35 200 tonnes d’or au total. Des pays comme la Pologne, le Kazakhstan, la Turquie, la Chine et la République tchèque continuent d’augmenter leurs stocks.

« Le dollar a perdu de sa superbe ces dernières années », observe Marion Laboure dans son rapport. Cette tendance à la dédollarisation profite directement à l’or et au bitcoin. Les ETF bitcoin américains ont attiré des centaines de milliards de dollars depuis le début de l’année 2024. Ils détiennent désormais 6,45 % de l’offre mondiale de bitcoins, soit plus de 165 milliards de dollars.

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Le bitcoin suit les traces de l’or

Marion Laboure établit un parallèle frappant. « Le comportement que nous avons observé envers l’or au XXe siècle présente des parallèles clairs avec la façon dont les décideurs politiques débattent actuellement du bitcoin », écrit-elle. Le bitcoin affiche une performance record et suscite une attention croissante en tant que réserve potentielle.

L’initiative américaine a ouvert la voie. En mars 2025, le président Donald Trump a signé un décret établissant une réserve stratégique de bitcoins. Cette réserve sera alimentée par les bitcoins saisis lors d’affaires judiciaires. Les États-Unis détiennent actuellement environ 200 000 bitcoins, d’une valeur de 17,5 milliards de dollars.

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Cette décision ne fait pas l’unanimité. Certains critiques craignent en effet que la volatilité extrême du bitcoin expose le gouvernement à des risques. D’autres s’interrogent sur l’impact de cette stratégie sur la confiance dans le dollar.

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Les stablecoins pourraient toutefois changer la donne

Tous les analystes ne partagent pas cette vision. JPMorgan avance une thèse différente. Selon la banque américaine, les stablecoins pourraient au contraire renforcer la demande de dollars. Ces monnaies numériques, généralement adossées à des actifs traditionnels, pourraient générer 1 400 milliards de dollars de demande supplémentaire d’ici 2027.

Cette projection remet en question le scénario de Deutsche Bank. Si les stablecoins dynamisent effectivement le dollar, celui-ci pourrait conserver sa position dominante plus longtemps que prévu.

Une complémentarité plutôt qu’une substitution

Marion Laboure tempère néanmoins son propos. « Ni le bitcoin ni l’or ne remplaceront entièrement le dollar américain », précise-t-elle. Dans son rapport, elle défend l’idée que les actifs numériques doivent rester « complémentaires » aux monnaies nationales dans la stratégie de réserve des banques centrales.

Plusieurs signaux encourageants se manifestent. La volatilité du bitcoin diminue progressivement. Le soutien réglementaire s’intensifie aux États-Unis et en Chine. Ces évolutions renforcent la confiance du marché envers cette classe d’actifs.

Les banques centrales opèrent actuellement une diversification historique de leurs réserves. Après des décennies de domination du dollar, elles explorent de nouvelles pistes pour sécuriser leurs avoirs. L’or retrouve son statut de valeur refuge par excellence. Le bitcoin tente de s’imposer comme son équivalent moderne.

Cette transition s’inscrit dans un contexte économique tendu. L’incertitude commerciale ne cesse de croître. Les tensions géopolitiques s’intensifient. Les investisseurs institutionnels sont à la recherche d’alternatives aux devises traditionnelles. Dans ce contexte, les réserves stratégiques des banques centrales pourraient connaître leur plus grande transformation depuis des générations.

Selon Deutsche Bank, cette évolution reflète la liquidité croissante du bitcoin, son importance stratégique grandissante et sa crédibilité croissante. Les deux actifs pourraient alors jouer un rôle structurel dans les réserves mondiales, servant de couverture contre l’inflation, le risque de change et l’instabilité géopolitique.

Selon une enquête du World Gold Council de 2025, 43 % des banques centrales prévoient d’augmenter leurs réserves d’or. Cette tendance devrait se poursuivre, portée par la recherche de sécurité financière dans un monde multipolaire.

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